09 juin 2006

Dialogue national: Les absurdités d'un accord compromis


AUTOPSIE DU PROJET D'ACCORD POLITIQUE DIT GLOBAL
Ma démarche ne s'inscrit pas dans la logique d'une critique délibérée du travail fait par les partis politiques et leurs alliées féminines, mais celle d'une analyse technique des éléments de fond du document soumis à l'attention des protagonistes et du peuple à la lumière des enjeux politiques dans mon pays. Comme d'autres citoyens j'ai lu attentivement le projet de compromis et je l'analyse en fonction des engagements pris et des attentes des Togolais du pays et de l'extérieur.
(Voir le texte intégral du projet d'accord, article précédent)

Le cadre électoral
Le projet d'accord fait part de quelques dispositions relatives à la révision du cadre électoral. Les réaménagements préconisés ne semblent pas prendre en compte les problèmes réels du système électoral au Togo. Quelques points méritent qu'on s'y penche sérieusement.

Les attributions, la composition de la CENI et de ses démembrements
"Tirant les enseignements des précédents processus électoraux, et agissant conformément à l’engagement n°1.3, les parties prenantes au Dialogue ont réaffirmé par consensus leur adhésion aux acquis de l’Accord-cadre de Lomé concernant les attributions, la composition et les démembrements de la CENI. Elles ont toutefois convenu d’y apporter des améliorations nécessaires à la transparence, à la liberté et à l’équité des élections."

En réalité les mesures préconisées ne font qu'augmenter le flou qui entoure l'institution CENI dans l'agencement juridico-politique togolais depuis 1998. Pour preuve: "(i) La Commission Electorale Nationale Indépendante est rétablie dans sa pleine mission d’organisation et de supervision des consultations électorales et référendaires. Elle est assistée, à sa demande, par l’Administration." Cette CENI là est une institution visiblement ad hoc, formatée pour l'organisation des élections législatives. On l'a déconnectée de l'Administration prétendument pour en garantir l'indépendance. En élaborant une telle commission électorale, les partis politiques donnent le pouvoir au Gouvernement de bloquer le processus électoral. Tel fut le cas de la CENI sous le Comité Paritaire de Suivi de l'Accord Cadre de Lomé; conséquence les élections consensuelles n'ont jamais eu lieu malgré tout le soutien de la communauté internationale.

"En plus des partis politiques, la société civile et l’Administration sont représentées dans la CENI"
Ces politiciens ignorent apparemment les exigences d'un système électoral et de l'administration électorale comme cela s'impose dans tous les processus électoraux aujourd'hui en Afrique.
Après avoir établi une relation de sujétion entre la CENI et l'Administration, on met cette même Administration dans la Commission Electorale. Enormité! Par contre c'est une chose normale et nécessaire que d'impliquer la société civile dans la CENI. Mais quelle société civile et sur quelle base sera-t-elle représentée dans la Commission? Les partis ont déjà créé un précédent dangereux en s'affublant les deux associations de femmes...

Au Burkina Faso, au Ghana et au Bénin la société civile joue un rôle moteur dans les commissions électorales. Elle les préside souvent et se montre capable de recul face aux menaces de corruption et de pressions diverses. Mais tout dépend de comment les autorités de ces pays traitent la société civile en question.

La CENI proposée par Agboyibo et les siens est une structure pléthorique de 19 membres (voir la composition détaillée dans le projet d'accord). Cela appelle quelques observations.
1- Le RPT est surreprésenté par rapport aux 5 partis qui ne sont pas en coalition;
2- L'ensemble des partis politiques sont surreprésentés par rapport à la société civile.
3- Les Commissions électorales locales indépendantes (CELI) exclusivement entre les mains des partis politiques vont être une chambre de confrontations. Pourquoi la société civile plus présente dans le Togo profond (que les partis) est exclue des CELI? A la différence de la CENI, institution nationale avec des prérogatives étendues, les CELI considérées comme démembrements sont d'habitude des structures techniques d'exécution des tâches d'organisation des élections.
4- Les bureaux de vote sont entièrement composés des membres de partis politiques. Ceci est une aberration. La CENI devrait recruter les membres des bureaux de vote sur la base de critères formels parmi les citoyens sachant lire et écrire dans les localités du pays sans tenir compte de leur appartenance politique. Par contre tous les partis politiques ont le droit d'être représentés dans les bureaux de vote par des délégués dûment mandatés par eux.

NB: Dans la sous région, les CENI tripartites et équitables sont les plus viables. Au Togo l'attribution intuitu personae des 2 places de la société civile aux deux associations féminies parties dans ce dialogue consacre le scandal d'une vision réductrice de la société civile nationale par le RPT et ses amis de l'opposition.

Scrutin, découpage et fichier électoral
"En vue d’aboutir à l’organisation d’élections démocratiques, équitables et crédibles, les parties prenantes au Dialogue ont convenu de la nécessité de faire procéder à un recensement électoral pour obtenir un fichier électoral fiable.Les modalités de ce recensement électoral seront déterminées par le Gouvernement."
Les partis politiques minimisent gravement les responsabilités et la tâche d'élaboration d'un système électoral. Ils font bien de "mettre en place une cellule chargée de procéder à une étude approfondie des différents modes de scrutin" mais ne définissement aucunément les orientations d'une telle mission. On évoque un "fichier électoral" comme s'il s'agissait d'un jeu quelconque. Sur le découpage électoral, sur le recensement et sur l'établissement des cartes d'électeur, le projet d'accord fait montre d'une paresse extraordinaire. Et le texte observe un grand silence sur l'administration du fichier électoral lui-même.

S'il s'agit d'informatiser l'ensemble des informations et des opérations relatives au corps électoral et aux processus électoraux, il faut entrevoir un processus d'au moins 18 mois nécessitant quelques millions de dollars et des compétences techniques éprouvées. Car il faut comprendre que l'informatisation du fichier électoral est un processus hautement technique et coûteux qui requiert une réelle volonté politique. Tout ceci doit transcender l'organisation l'organisation d'élections législatives sous perfusion européenne.

L'observation des élections
"Conformément à l’engagement n° 1.5, les parties prenantes au Dialogue se sont engagées à accepter la présence des observateurs internationaux aux prochaines élections législatives afin d’attester de la régularité et des conditions de transparence et de sécurité de son déroulement. Le Dialogue national recommande à la CENI d’étudier les conditions de suivi du processus du scrutin par des observateurs nationaux."

Pourquoi s'engager à accepter l'observation internationale des élections et faire des mystères sur l'observation nationale qui s'impose naturellement? Les partis font ici preuve d'une fuite de responsabilité. Confier à la CENI d'étudier les conditions de suivi du processus du scrutin par les observateurs nationaux est une aberration. La CENI met en oeuvre des actions qu'on lui confie elle n'agit pas en fonction des opportunités et des circonstances.

Quota de siège pour les femmes
C'est une bonne chose d'évoquer le problème de sous-représentation voire d'absence des femmes dans les sphères de décision au Togo. Mais le dialogue partisan aurait pu faire un pas qualitatif en s'engageant pour un quota clair. Ils se contente d'inviter les "partis politiques à s’imposer un minimum de candidatures pour les femmes aux élection". Le GF2D et le REFAMPT n'auront apparemment pas convaincu leurs hommes.

Les réformes institutionnelles
Sur ce point aussi le dialogue national a péché par manque d'ambition. Les partis en conclave prescrivent la révision du code électoral sans en donner des lignes directrices. Ils "préconisent que les réformes convenues soient mises en forme de textes législatifs par un Comité de rédaction en vue de leur incorporation au code électoral à la diligence du gouvernement." Mais quelle sera la force juridique d'un tel document? Ce qu'il faut craindre c'est que cette fuite en avant n'amène les "dialogueurs" devant l'Assemblée nationale du RPT qui doit au dernier chef homologuer les réformes à faire. Et on se retrouvera en 1999 avec des blocages à n'en plus finir.

Le dialogue veut mettre en place une commission pour étudier la révision de la Constitution. Là aussi il évoque vaguement des débats sans indiquer de cahier de charges clair.

Les problèmes de sécurité et l'impunité
On voit ici une litanie de déclarations d'intention. On savait déjà que l'Armée ne se sent pas concernée par le dialogue en cours. Les partis préconisent donc que des "des personnes ressources soient désignées pour étudier les problèmes de l’Armée et des autres Forces de sécurité ainsi que les solutions à y apporter, avec le concours des partenaires du Togo." C'est une fuite en avant. Les recommandations faites n'empêchent pas que les partis constatent les défaillances en matière de sécurité au Togo et prennent des mesures urgentes.

Sur les questions d'impunité, Agboyibo et ses amis font un jeu de saute-mouton. " Toutes les délégations reconnaissent que l’impunité des actes de violence à caractère politique est un phénomène grave que le Togo a connu de tout temps notamment à l’occasion des processus électoraux de 1958 à 2005." Cette remontée dans le temps est surréaliste! La période de référence, 1958 est sujette à caution. En 1958 l'Etat souverain du Togo qui nous préoccupe aujourd'hui n'existait pas. Apparemment des gens ont voulu équilibrer des plaies de l'histoire de ce pays pour solder des responsabilités.

Formation d'un nouveau gouvernement et dispositions finales
Le projet ne motive pas ce qu'on présente comme un consensus et qui est visiblement la mesure la plus importante du dialogue surtout pour les partis d'opposition. "Toutes les délégations ont adhéré au principe de la formation d’un nouveau gouvernement et ont déclaré être disposées à y entrer." Y a-t-il eu un accord de gouvernement? Quelles en sont les modalités? Si on comprend bien, les innonbrables questions laissées en suspens pourraient être réglées par ce gouvernement. Donc la cause est entendue.
Il y a plus grave, "les parties prenantes au Dialogue lancent en conséquence à l’Union Européenne, un appel en vue de la reprise entière de la coopération avec le Togo". C'est la capitulation la plus catastrophique pour les anciens opposants au régime. Sans même attendre un commencement d'exécution des mesures timides préconisées, on est prêt à l'extrême concession.

En conclusion
Si ce projet est adopté, on retiendra quatre choses:
1- Le dialogue n'aura pas réussi à définir un cadre politique et légal clair pour le processus électoral.
2- Les parties au dialogue s'entendent pour remettre à plus tard et à des commissions virtuelles le règlement des questions urgentes de sûreté et de conciliation.
3- Le projet d'accord consacre deux partitions: celles des 6 partis au dialogue avec les autres formations politiques du pays d'une part et celle de deux associations de femmes se copinant avec des politiciens au détriment de la société civile nationale d'autre part.
4- La notion "opposition" a disparu du jargon d'Agboyibo et ses copains.

Mais si le projet n'est pas adopté, nous allons vers l'échec du dialogue. C'était prévisible.

J'attends vos commentaires.

Dany K. Ayida

Dialogue: Vers un compromis entre les partis politiques et leurs alliées?

DIALOGUE POLITIQUE INTER-TOGOLAIS

PROJET D'ACCORD POLITIQUE GLOBAL

PREAMBULE

Conformément aux 22 engagements souscrits par le Gouvernement de la République Togolaise à l’issue des consultations avec l’Union Européenne dans le but de consolider la démocratie, le respect des droits de l’homme, et de promouvoir au Togo un climat de stabilité politique et de paix sociale propices à la relance de l’économie nationale et au bien-être des populations, le RPT et les 5 autres partis signataires de l’Accord cadre de Lomé du 29 juillet 1999 (CAR, CDPA, CPP, PDR, UFC), ainsi que les représentants du Gouvernement et 2 organisations de la société civile (GF2D, REFAMPT) se sont réunis en Dialogue national, à Lomé, du 21 avril 2006 au …….…à l’initiative du Chef de l’Etat.En vue d’un bon déroulement de ses assises, le Dialogue national a mis en place un bureau comprenant: Me Yawovi AGBOYIBO, Président, Mme Kissem TCHANGAÏ - WALLA, Vice-présidente et M. Gilbert BAWARA, Rapporteur.

Le Dialogue national a, par une approche pragmatique et graduelle, examiné du 28 avril au 16 mai 2006, un ordre du jour ouvert comportant, outre la révision du cadre électoral, des problèmes de fond dont, entre autres, le besoin de réforme de la Constitution et des institutions, de l’Armée et des autres services de sécurité, la question de l’impunité, le cas des réfugiés et des personnes déplacées.

Les débats se sont déroulés dans un climat de sérénité et de respect mutuel, en présence d’un représentant de son Excellence M. Blaise Compaoré, Président du Burkina-Faso, et des observateurs de la CEDEAO et de l’Union Européenne. A l’issue de ces débats et des consultations bilatérales entre les différentes délégations et le Bureau, les parties prenantes au Dialogue sont parvenues à un accord politique global portant sur les 10 points ci-après:
1. la révision du cadre électoral
2. les réformes institutionnelles
3. la réforme de l’Armée et des autres services de sécurité
4. la question de l’impunité
5. le financement des partis politiques
6. le cas des réfugiés et des personnes déplacées
7. la mise en place d’un cadre permanent de dialogue et de concertation sur des sujets d’intérêt national
8. la mise en place d’un mécanisme de suivi de la bonne application des décisions du Dialogue national
9. la formation d’un nouveau gouvernement
10. les dispositions finales

1. LA REVISION DU CADRE ELECTORAL
Les parties prenantes au Dialogue se sont toutes montrées soucieuses d’œuvrer à ce que les prochaines élections législatives soient organisées dans des conditions de liberté, d’équité et de sécurité, conformes aux standards internationalement admis. Elles ont, dans cette optique, procédé au réaménagement du cadre électoral en vigueur sur la base des principes et orientations se rapportant aux 11 points suivants:
1. les attributions, la composition de la Commission Electorale Nationale Indépendante (CENI) et ses démembrements,
2. les conditions d’éligibilité aux élections législatives,
3. le mode de scrutin,
4. le découpage électoral,
5. le recensement pour la confection du fichier électoral,
6. les cartes d’électeurs infalsifiables,
7. le montant du cautionnement,
8. l’observation des élections,
9. le contentieux des élections législatives,
10. l’accès équitable aux médias d’Etat,
11. le quota de sièges pour les femmes.

1.1 Les attributions, la composition de la CENI et de ses démembrements
Tirant les enseignements des précédents processus électoraux, et agissant conformément à l’engagement n°1.3, les parties prenantes au Dialogue ont réaffirmé par consensus leur adhésion aux acquis de l’Accord-cadre de Lomé concernant les attributions, la composition et les démembrements de la CENI. Elles ont toutefois convenu d’y apporter des améliorations nécessaires à la transparence, à la liberté et à l’équité des élections. Elles ont pris à cet égard, les décisions ci-après:
(i) La Commission Electorale Nationale Indépendante est rétablie dans sa pleine mission d’organisation et de supervision des consultations électorales et référendaires. Elle est assistée, à sa demande, par l’Administration.
(ii) En plus des partis politiques, la société civile et l’Administration sont représentées dans la CENI.
(iii) La CENI ainsi restructurée, est composée, pour les élections législatives à organiser dans le cadre de l’exécution des 22 engagements, de 19 membres désignés à raison de :
- 5 par la mouvance présidentielle (RPT);
- 10 par les 5 autres partis signataires de l’Accord-cadre de Lomé (CAR, CDPA, CPP, PDR, UFC) dont 2 par chacun;
- 2 par la société civile, à raison d’un par chacune des 2 organisations qui prennent part au dialogue national (GF2D et REFAMPT) ;
- 2 par l’Administration.
La CENI élit en son sein son Président et les autres membres du Bureau. Le Président élu est nommé par décret pris en conseil des Ministres.(iv) Les démembrements de la CENI sont allégés et composés comme suit :
(a) Les Commissions Electorales Locales Indépendantes (CELI) :
9 membres désignés à raison de:
- 2 par l’Administration dont 1 Magistrat : Président
- 2 par la mouvance présidentielle (RPT);
- 5 par les 5 autres partis signataires de l’Accord cadre de Lomé (CAR, CDPA, CPP, PDR, UFC) dont 1 pour chacunLes membres du bureau de chaque CELI autres que le Président sont élus par leurs pairs.
Chaque CELI est assistée dans l’accomplissement de ses tâches par une commission technique comprenant des représentants des partis politiques et de l’Administration.

(b) Les bureaux de vote: 8 membres désignés à raison de :
- 1 par l’Administration : Président
- 2 par la mouvance présidentielle (RPT);
- 5 par les 5 autres partis signataires de l’Accord cadre de Lomé (CAR, CDPA, CPP, PDR, UFC) dont 1 par chacun;
Les dirigeants des bureaux de vote autres que le Président sont nommés par la CENI sur proposition des CELI.

1.2. Les conditions d’éligibilité
Les parties prenantes au Dialogue recommandent que la condition de délai de résidence prévue par le code électoral d’avril 2000 issu de l’Accord-cadre de Lomé soit supprimée pour les prochaines élections législatives.

1.3. Le mode de scrutin
Les parties prenantes au Dialogue national conviennent de mettre en place une cellule chargée de procéder à une étude approfondie des différents modes de scrutin et de remettre son rapport au gouvernement dans un délai imparti.

1.4. Le découpage électoral
Au regard de l’accroissement démographique et des mouvements de populations consécutifs à l’urbanisation grandissante, les parties prenantes au Dialogue préconisent que le découpage électoral qui sous-tend la configuration actuelle de l’Assemblée Nationale soit revu sur des bases rationnelles et en respectant le principe de la continuité territoriale.Toutefois, étant donné la complexité des paramètres qu’il conviendrait de prendre en compte ainsi que des équilibres historiques qui ont prévalu par le passé, les parties prenantes au Dialogue ont recommandé qu’une étude approfondie soit menée sur cette question, sur la base notamment d’un recensement général de la population.Néanmoins, les parties prenantes au Dialogue ont proposé que, pour les prochaines élections législatives, une solution appropriée soit trouvée pour la Commune de Lomé et la Préfecture du Golfe.

1.5. Le recensement pour la confection du fichier électoral
En vue d’aboutir à l’organisation d’élections démocratiques, équitables et crédibles, les parties prenantes au Dialogue ont convenu de la nécessité de faire procéder à un recensement électoral pour obtenir un fichier électoral fiable.Les modalités de ce recensement électoral seront déterminées par le Gouvernement.

1.6. Les cartes d’électeurs infalsifiables
Pour des motifs identiques à ceux justifiant l’organisation d’un recensement électoral, les parties prenantes au Dialogue décident que la CENI prenne des dispositions nécessaires pour établir des cartes d’électeurs infalsifiables.Le Dialogue national recommande que ces cartes infalsifiables soient, si possible, munies de photo.

1. 7. La réduction du montant du cautionnement pour les législatives
Afin de tenir compte des difficultés socio-économiques auxquelles le pays fait face et en vue de favoriser la participation des femmes et des citoyens à revenu modeste à la vie politique nationale, les parties prenantes au Dialogue se sont accordées sur le principe de la réduction du montant du cautionnement pour les élections législatives.Le taux de cette réduction sera fixé par le gouvernement.

1.8. L’observation des élections
Conformément à l’engagement n° 1.5, les parties prenantes au Dialogue se sont engagées à accepter la présence des observateurs internationaux aux prochaines élections législatives afin d’attester de la régularité et des conditions de transparence et de sécurité de son déroulement.Le Dialogue national recommande à la CENI d’étudier les conditions de suivi du processus du scrutin par des observateurs nationaux.

1.9. Le contentieux des élections législatives
Les parties prenantes au Dialogue national conviennent, à propos du contentieux des élections législatives, de ce qui suit :
(i) Le Dialogue national préconise :
(a) que les organes compétents procèdent à la recomposition de la Cour constitutionnelle en veillant à ce que les personnalités à nommer répondent aux critères de professionnalisme, de crédibilité et d’indépendance;
(b) qu’en raison des réformes apportées à la CENI, de la recomposition requise de la CENI, et des dispositions des points 9.2 et 9.3 ci-après, la sous¬ commission de la CENI chargée du contentieux électoral soit supprimée.
(ii) En cas de contestation des inscriptions ou omissions sur les listes électorales ou des opérations de distribution des cartes d’électeurs: - la plainte est soumise à la Commission Electorale Locale Indépendante (CELI) ;- la partie non satisfaite de la décision de la CELI peut introduire un recours devant la CENI ;- .la décision de la CENI peut être déférée devant le Tribunal de Première Instance territorialement compétent qui statue en dernier ressort.
(iii) Le contentieux des candidatures à la députation ainsi que les contestations concernant les opérations de vote et .la conformité des résultats proclamés par la CENI relèvent de la compétence de la Cour constitutionnelle.

1.10. L’accès équitable aux médias d’Etat
En vue de favoriser l’enracinement du pluralisme dans le domaine de l’information et d’assurer une gestion apaisée des processus électoraux, les parties prenantes au Dialogue ont réaffirmé le principe de l’accès équitable des partis, des candidats et de la société civile aux médias de service public. Elles ont reconnu les efforts actuellement réalisés dans le secteur des médias et souhaité que ces efforts soient poursuivis et consolidés.Elles ont également souhaité que les médias de service public soient dotés en moyens et équipements appropriés à leurs missions.

1.11. Le quota de sièges pour les femmes
Les parties prenantes au Dialogue se sont engagées à œuvrer en vue d’assurer la représentation équitable des femmes dans les processus électoraux et dans la vie politique nationale.Dans cette optique, elles invitent les partis politiques à s’imposer un minimum de candidatures pour les femmes aux élections.2.

LES REFORMES INSTITUTIONNELLES
2.1. Les parties prenantes au Dialogue se sont accordées sur la nécessité de procéder à des réformes institutionnelles visant à consolider la démocratie, l’Etat de droit et la bonne gouvernance.
2.2. Elles réaffirment que c’est dans cette optique qu’elles ont examiné et arrêté au chapitre l du présent accord les points sur lesquels le code électoral en vigueur doit être révisé pour que les prochaines élections législatives soient libres, transparentes et équitables.Elles préconisent que les réformes convenues soient mises en forme de textes législatifs par un Comité de rédaction en vue de leur incorporation au code électoral à la diligence du gouvernement.
2.3. Le Dialogue national, prenant en compte la complexité des facteurs qui sous-tendent les règles constitutionnelles, a décidé de mettre en place une commission chargée de procéder à une étude approfondie des propositions de révision constitutionnelle formulées lors des débats, notamment à propos du régime politique approprié au pays et de ses implications relatives à la nomination et aux prérogatives du Premier Ministre, des conditions d’éligibilité au mandat de Président de la République, de la limitation de la durée du mandat présidentiel, du Sénat et des règles de désignation des sénateurs, de la réforme de la Cour constitutionnelle.
2.4. Les parties prenantes au Dialogue conviennent que le dossier de réforme de la justice soit un des chantiers prioritaires du nouveau gouvernement et de celui qui sera issu des prochaines élections législatives.
2.5. Le Dialogue national recommande au nouveau gouvernement de mettre en place la Commission Nationale des Droits de l’Homme (CNDH) reformée en son mandat et en son statut, conformément à l’engagement

2.5.3. LES PROBLEMES DE SECURITE
3.1 Toutes les délégations conviennent que des dispositions nécessaires soient prises en vue de la réaffirmation solennelle et du respect effectif:
- de la vocation apolitique, du caractère national et républicain de l’Armée et des Forces de sécurité, conformément à la Constitution et aux lois pertinentes du pays;
- de la distinction entre les fonctions de l’Armée d’une part, et celles de la Police et de la Gendarmerie d’autre part, de façon à ce que la première se consacre à sa mission de défense de l’intégrité du territoire national et les secondes à leurs missions de maintien de l’ordre et de la sécurité publique.

3.2 Le Dialogue national préconise que des personnes ressources soient désignées pour étudier les problèmes de l’Armée et des autres Forces de sécurité ainsi que les solutions à y apporter, avec le concours des partenaires du Togo. En raison de la spécificité et de la complexité des questions relatives aux Forces de sécurité, le Dialogue national recommande que les personnes ressources à désigner abordent le problème avec sérénité en associant étroitement les corps concernés à l’accomplissement de leur mission.Ce processus de réformes à initier par le gouvernement devra s’inscrire dans la durée, avec la phase de mise en œuvre à réaliser par le gouvernement qui sera issu des prochaines élections législatives.
3.3 Dans l’immédiat, 1e gouvernement prendra toutes les dispositions utiles afin que les forces de défense et de sécurité s’abstiennent de toute interférence dans le débat politique.
3.4 Le Dialogue national recommande que les effectifs et les moyens d’action de la police et de la gendarmerie soient renforcés pour leur permettre d’assumer efficacement leurs missions.
3.5 Le Dialogue national exhorte les partis politiques à s’abstenir de tout ce qui peut être perçu comme des provocations à l’égard de l’Armée et des Forces de sécurité, et à œuvrer à une confiance réciproque entre ces dernières et les populations.
3.6 Le Dialogue national recommande que soit mis en place, au niveau national, un mécanisme d’alerte, le cas échéant, des services compétents à la bonne application des mesures de sécurisation des activités des partis politiques et des processus électoraux. Ce mécanisme dispose de relais au niveau de la Commune de Lomé et de chaque Préfecture.Le mécanisme et ses relais sont composés de représentants des partis politiques, des autorités administratives et des forces de sécurité.

4. LE PROBLEME DE L’IMPUNITE
4.1. Toutes les délégations reconnaissent que l’impunité des actes de violence à caractère politique est un phénomène grave que le Togo a connu de tout temps notamment à l’occasion des processus électoraux de 1958 à 2005.Elles estiment que toutes les forces vives du pays doivent s’accorder à la combattre.
4.2. S’agissant des solutions à rechercher à cet effet, les délégations ont souligné que le phénomène est complexe et qu’il requiert à la fois des mesures de vérification des faits, des actes de réconciliation et des dispositions de nature à promouvoir la justice et l’Etat de droit.Dans cette triple optique:
(a) le Dialogue national préconise la création d’une Commission chargée de faire la lumière sur les actes de violence à caractère politique, commis durant la période allant de 1958 à ce jour, et d’étudier les modalités d’apaisement des victimes.
(b) le Dialogue national recommande que les pouvoirs publics valorisent les hommes et les femmes de tous bords qui ont la compétence, l’intégrité et l’esprit d’indépendance nécessaires au bon fonctionnement des Cours et Tribunaux, de la Police judiciaire et autres institutions à qui incombe l’éradication de l’impunité.

5. LE FINANCEMENT DES PARTIS POLITIQUES
5.1 Les parties prenantes au Dialogue adhèrent à l’idée que l’Etat apporte sa contribution financière aux frais de fonctionnement des partis politiques et à leurs dépenses de campagnes électorales. Elles rappellent à cet effet la loi n° 91-4 du 12 avril 1991 qui a prévu à l’alinéa 2 de son article 18 que «les partis politiques bénéficient ... d’une aide financière de l’Etat. Cette aide est attribuée aux partis ayant recueilli au moins 5 % des suffrages sur le plan national aux élections législatives ».
5.2 Le Dialogue national recommande que le nouveau gouvernement détermine dans les meilleurs délais, les modalités de financement des partis politiques par l’Etat.
5.3 Dans le cadre des mesures à prendre pour une représentation équitable des femmes dans les institutions, le Dialogue national convient que soit accordé aux formations politiques dont les élus aux élections législatives et locales comporteraient un minimum de femmes à définir, un bonus proportionnel au nombre des élues.

6. LE CAS DES REFUGIES ET DES PERSONNES DEPLACEES
6.1 Toutes les délégations ont insisté sur l’urgence à tout mettre en œuvre pour assurer le retour et la réinsertion des réfugiés et des personnes déplacées.
6.2 Elles soulignent que le présent accord politique s’inscrit dans cette perspective dans la mesure où il est de nature à créer un environnement politique rassurant pour les réfugiés et les personnes déplacées.
6.3 Le Dialogue décide de mettre en place un comité ad hoc pour appuyer les efforts du Haut Commissariat chargé des Rapatriés et de l’Action Humanitaire dans sa mission d’organisation et de coordination du processus de rapatriement et de réinsertion des réfugiés et des personnes déplacées. Ce comité prendra attache avec les réfugiés dans les pays d’accueil respectifs en vue d’examiner avec eux les voies et moyens susceptibles d’accélérer leur retour.

7. LA MISE EN PLACE D’UN CADRE PERMANENT DE DIALOGUE ET DE CONCERTATION SUR LES SUJETS D’INTERET NATIONAL
Les parties prenantes au Dialogue reconnaissent toutes le bien fondé du principe de la création d’un cadre permanent de dialogue et de concertation sur les sujets d’intérêt national.Elles conviennent que la fixation de sa mission, de sa composition et des modalités de son fonctionnement fassent l’objet d’une étude approfondie.

8. LA MISE EN PLACE D’UN MECANISME DE SUIVI DE LA BONNE APPLICATION DES DECISIONS DU DIALOGUE NATIONAL
Toutes les délégations ont marqué leur accord sur la mise en place d’un mécanisme de suivi de la bonne application des décisions du Dialogue national.Elles décident qu’il soit constitué par des représentants des parties prenantes au Dialogue et aux organisations qui ont désigné des observateurs pour suivre les travaux.

9. LA FORMATION D’UN NOUVEAU GOUVERNEMENT
Toutes les délégations ont adhéré au principe de la formation d’un nouveau gouvernement et ont déclaré être disposées à y entrer.

10. LES DISPOSITIONS FINALES
10.1. Toutes les composantes du Dialogue s’accordent à reconnaître que la signature du présent accord constitue un élément significatif du niveau avancé de la réalisation des 22 engagements.Les parties prenantes au Dialogue lancent en conséquence à l’Union Européenne, un appel en vue de la reprise entière de la coopération avec le Togo, en prenant toutes l’engagement d’œuvrer à travers les institutions à mettre en place (Gouvernement, CENI, cadre permanant de Dialogue, mécanisme de suivi, Commissions de travail, . . .) à ce que les élections législatives à organiser dans le cadre de la mise en œuvre des 22 engagements soient libres, transparentes et équitables.
10.2 Toutes les parties prenantes au Dialogue s’engagent à promouvoir la réconciliation nationale et l’instauration d’une véritable culture de tolérance, de la légalité républicaine et de l’Etat de droit.
10.3 Les parties prenantes au Dialogue national conviennent qu’il soit établi à l’adresse des organes compétents et annexé au présent accord :
(i) le récapitulatif des synthèses des débats du 28 avril au 16 mai 2006
(ii) la liste, s’il y a lieu, des points de désaccord persistants à propos desquels une délégation demanderait qu’il soit recouru à des facilitateurs ;
(iii) la liste des membres de la cellule d’étude approfondie du mode de scrutin
(iv) un calendrier détaillé du processus des prochaines élections législatives avec toutes les précisions nécessaires concernant notamment les dates de remise au gouvernement du rapport de la cellule du mode du scrutin et des projets de textes législatifs élaborés par la commission de rédaction de la version révisée du code électoral, des échéances de l’installation de la CENI et ses démembrements, de la tenue du scrutin ;
(v) la liste des tâches spécifiques assignées par le Dialogue national au nouveau gouvernement;(vi) la liste des membres
du comité ad hoc pour le retour des réfugiés et des personnes déplacées ;
(vii) la liste des membres de la commission d’étude des propositions de révision de la constitution;
(viii) la liste des membres du comité de suivi de la bonne application des décisions du Dialogue.

Fait à Lomé, le 02 juin 2006 Pour le Dialogue National
Le Président,
Yawovi Agboyibo