31 mai 2010

France-Afrique: Quelque chose a changé quand même

Le somment France-Afrique de Nice qui s'ouvre ce jour à Nice ne ressemble guère à toutes ces grands-messes auxquelles Mitterrand et Chirac nous avaient habitué. Eh oui, il faut le reconnaitre. Car même si on n'aime pas Sarkozy et sa  bande de -néo-françafricains" (Guéant, Johandet, Bourgi...) il faut admettre que l'Afrique avec laquelle la France tente de faire affaire aujourd'hui n'est plus la même. Je ne parle pas des acteurs à la tête des Etats (les lignes ont peu bougé de ce côté-là), mais je parle de la nouvelle dynamique de relations internationales dans laquelle intervient cette rencontre. "La place de l'Afrique dans la gouvernance mondiale" est le thème choisi pour ce 25ème sommet France-Afrique.

Le grand changement dans les rapports entre la France et l'Afrique, c'est que les relations ne peuvent plus être fondées sur le paternalisme et l'interventionnisme qui ont caractérisé les 40 ou 45 dernières années. Elles sont de plus en plus marquées par des alliances stratégiques autour de questions économiques ou géo-politiques. Sarkozy ne s'y est pas trompé en s'engageant à l'ouverture de ce sommet à soutenir un siège permanent de l'Afrique au Conseil de sécurité des Nations Unies. L'Afrique en réclame deux. L'Afrique du Sud et le Nigéria sont candidats; l'Egype et l'Algérie n'en demandent pas moins.

Il faut saluer le pragmatisme de ce rendez-vous qui ne peut plus frustrer les nationalistes africains. Des rencontres de ce genre se multiplient d'ailleurs. La Chine aussi rencontre l'Afrique réunie. Elle a peut-être ouvert les yeux à cette France qui s'est trop longtemps fourvoyée dans ses relations jugées incestueuses avec ses anciennes colonies. D'ailleurs, la France qui ne cache plus ses prétentions affiche ses priorités en invitant Zuma le Sudaf et Jonathan le Nigerian puis en faisant co-présider le sommet par Moubarak l'Egyptien... Le pragmatisme est du côté de l'ouverture du sommet dans son agenda aux questions économiques.

L'enjeu pour de telles rencontres internationales minutieusement préparées et orchestrées par les partenaires de l'Afrique, c'est que les leaders du continent eux-mêmes puissent être à la hauteur des enjeux en se préparant en conséquence. L'Afrique ne s'unit guère pour défendre l'intérêt commun de ses peuples. Beaucoup de chefs d'Etat restent des sous-fifres et des bénis-oui-oui, prêts à se plier aux injonctions d'une puissance (tutélaire). L'indépendance (50 ans cette année!) est inachevée, dans la mentalité des dirigeants et dans leurs agissements.

Le pré-carré, aux dires de beaucoup de dirigeants français n'existerait plus. Il y a du vrai. Même si les réseaux d'influence continuent à pulluler et à tirer les ficelles ça et là sur des dossiers économiques et politiques. L'Afrique à l'heure de la diversification est plus que jamais globalisée. Ses présidents qui écoutent les belles paroles de Sarkozy à Nice ont aussi leurs oreilles tournées vers Pékin, Washington, Berlin, Moscou ou Tokyo. C'est ce qui a changé et devrait durer pour que l'Afrique sorte gagnante de ses relations.

29 mai 2010

L'espérance face à un Gouvernement de honte

Le RPT l'a voulu comme un moyen de couper l'herbe sous le pied à ses opposants. Gilbert F. Houngbo a mené des consultations pendant 3 semaines. Il en sort un attelage gouvernemental hétéroclite, rétrograde et pour le moins anti-démocratique. Quelques caciques de Gilchrist Olympio y sont entrés De vieux chevaux de retour de la génération Eyadema sont là. Mais l'événement notable, loin de ce gouvernement qui n'a d'union que de nom et de prétention, c'est bien le tsunami que cela suscite au sein du principal parti d'opposition: l'Union des Forces de Changement.

La honte, c'est d'abord l'entêtement de Faure Gnassignbé et Gilbert Houngbo à vouloir vendre aux Togolais une entente qui n'en est guère. Le peuple réel n'a cure de ces épousailles entre un leader en mal de légitimité et un président mal venu au pouvoir, réelu grâce à la triche et sans aura ni vision. Ils ont forcé les choses, ils récolteront un effet induit qu'ils ne sauront jamais gérer.
La honte, c'est aussi Gilchrist Olympio, ce vieux politicien qui s'incline devant le fils de son meilleur ennemi, après avoir lamentablement échoué à apporter le changement au Togo. Par ce forfait, l'ex-leader charismatique de l'opposition creuse sa propre tombe. Il s'est comporté en "loser", passant outre la position du Bureau National de son parti pour se jeter sans contrepartie ( ) dans les bras du RPT. On ne peut plus rien espérer de ce vieux. C'est depuis 2003 que j'ai compris son vilain jeu: il avait empêchés les démocrates de prendre le pouvoir, après que la CNSC/CONEL en liaison avec les candidats (Akitani-Bob et Péré Dahuku) et d'autres opposants eurent mis en place un plan de soulèvement suite à l'élection présidentielle. C'est la même chose qu'il fait avec le FRAC actuellement. Il en est apparemment récompensé, tout honte bue...

Peut-on s'attendre à ce que la fronde actuelle à l'UFC se transforme en une nouvelle dynamique de réorganisation des forces politiques nationales pour le changement et l'alternance? Je pense que ceci est possible. Un nouveau leadership à l'UFC pourrait colmater les brèches de l'opposition défaitiste, regrouper les forces citoyennes du pays et de la diaspora et engager des actions décisives. Quand on sait que le Togo est en train d'initier un processus de décentralisation qui va s'opérationnaliser en 2011 et que l'année suivante l'Assemblée nationale devrait être renouvelée, il faut souhaiter que l'essai actuel soit transformé et se traduise par une stratégie réelle, formelle, structurée et gagnante. En cela, la tenacité manifestée par Fabre depuis les dernières élections serait un grand atout.

Je milite personnellement pour une refonte de l'ensemble des forces politiques nationales au sein d'une nouvelle alliance autour du noyau de l'UFC et des éléments du FRAC. Fabre et Lawson ont démontré qu'ils sont des démocrates patriotes ayant de la hauteur dans l'engagement politique et de la considération pour le peuple. Je les ai vus à l'oeuvre des années durant.

Une nouvelle dynamique d'opposition pour l'alternance au Togo est possible et urgente. Il faut pour cela que des concertations se tiennent tous azimuts en vue d'adopter une orientation, un agenda et des ressources qui permettent de réussir, enfin!

15 mai 2010

GUNT Vs Démocratie et Changement

Je l'avais dit. Tout ce bruit, toute cette agitation n'avaient pour but que de créer les conditions de participation de l'opposition en place à Lomé au prochain gouvernement d'union. Gilbert Houngbo reconduit à la primature, la feuille de route définie par Gnassingbé Faure ne présente guère d'équivoque: former un gouvernement d'union nationale en y incluant, dans la mesure du possible, tous les leaders du FRAC.
Ceux qui croyaient que la mobilisation consécutive à la consultation présidentielle (je n'ose pas parler d'élection) ferait entrevoir une nouvelle dynamique de changement finiront par se rendre à l'évidence. Cela fait longtemps au Togo que la classe politique ne raisonne plus en termes d'intérêt national. Ces hommes et ces femmes vieillissants ne pensent plus qu'à eux-mêmes. Le bilan déshonorant trahit les valeurs. Le bétail populaire ne sert que d'attirail et l'appareil d'Etat est l'appât dont se sert les tenants du RPT "nouvelle génération".

Aussi bien la méthode que le principe de la démarche ne sont pas défendables. Car premièrement, aucun des partis du FRAC ne fait état de consultation de sa base (sondage, fora, etc...) pour déterminer la position à adopter. Tous en réaction à l'invitation de Houngbo, soit déclinent (en essayant de motiver) soit posent des conditions plus ou moins acceptables. Or, l'approche de lutte populaire que sous-tendaient les manifestations du FRAC devraient conduire à cette démocratie à la base pour légitimer la nouvelle orientation qu'on prétendait représenter. Deuxièmement l'objet des contestations et le programme évident du FRAC ne devraient laisser de place à une quelconque cohabitation.

Je ne crois pas au Gouvernement d'union. C'est le remède des systèmes claudicants: ceux qui n'ont pas de repère; ceux qui rassemblent pour étouffer les réelles aspirations et étancher la soif personnelle des ventrus de la République. Eyadèma était un adepte de cet artifice politique. Bongo en usait abondamment aussi, tous ayant fait l'école d'Houphouet. C'est un remède politique de dirigeants illégitimes qui font tourner en rond leur peuple pour continuer à mal gouverner.

La roue de l'histoire tourne. Mais au Togo, nous restons au point de départ. Il faut juste en faire le constat, pour comprendre qu'on ne peut plus rien créer de bon avec ce personnel. La perspective n'est possible qu'à condition d'imposer l'alternative qui rompt avec le passé. Qui sont les candidats de ce renouveau de la pensée et de l'action politiques au Togo? Sont-ils capables d'en trouver les moyens et changer radicalement leurs propres méthodes de lutte? La question ne s'adresse pas à des individus. Elle cible des groupes d'hommes et de femmes engoncés dans un océan d'hésitation, de calcul et de fausse pudeur.

01 mai 2010

50 ans : à la recherche de la Nation togolaise

Le 27 Avril 2010, l’Etat togolais a eu 50 ans. Un demi-siècle de vie d’un pays marqué par des antagonismes incessants et de multiples tourments. Les cicatrices sont nombreuses. Depuis le coup d’Etat de Janvier 1963 perpétrée avec la bénédiction de la France, ancienne métropole, les Togolais sont profondément divisés. Le Rassemblement du peuple togolais (RPT), ancien parti unique, au pouvoir depuis sa création en 1969 n’a jamais réussi à réconcilié les Togolais entre eux. Au contraire, cette formation est à la source de la survivance des clivages ethniques. Ces divisions ont été malheureusement exacerbées à partir de 1990, avec les revendications de démocratie et de liberté qui sont aujourd’hui loin d’être satisfaites.

50 ans de vie n’ont pas suffi aux Togolais pour créer une Nation. La communauté qui vit à l’intérieur de ce petit rectangle qui reste de l’ancienne colonie allemande est un assemblage politico-démographique dont la charpente politique est d’une faiblesse sans pareille. Eyadema a su régner sans partage pendant 40 ans grâce à l’armée tribalisée. Son fils poursuit les mêmes pratiques et éprouve bien du mal à arrimer la gouvernance aux pratiques d’une nation moderne. Ce n’est pas une question de discours ou d’opinion. La Nation devrait être la résultante d’engagements émotionnels, de culture partagée, de volonté commune soutenue par des élans collectifs continus. La Nation est un esprit qui habite la population et la propulse vers des réalisations qui soudent sa cohésion. Le Togo n’a pas réalisé l’union de ses fils, parce qu’il n’a jamais eu de dirigeant à la hauteur de cette ambition. Faure Gnassingbé, même s’il passait 40 années à la tête du Togo comme son père ne marquera pas ce pas qualitatif : ses capacités personnelles et le péché originel de l’essence de son pouvoir annihileraient toute tentative dans ce sens.

Il ne s’agit pas de proclamation rédhibitoire : la Nation togolaise, comme toutes celles qui ont pu naître dans le monde en étant issues de l’autodétermination de territoires autrefois colonisés devrait prendre appui sur l’Etat. Or l’Etat du Togo n’a guère été viable. La mauvaise gouvernance et l’incompétence des dirigeants empêchent de mettre en place une direction qui maîtrise tout le potentiel d’un appareil politique et administratif qui répond véritablement aux besoins d’un pays moderne. Les réformes mille fois engagées n’ont pas abouti ; parce qu’on a rarement les gens qu’il faut à la place qu’il faut.

L’avenir du Togo procèdera d’une révolution qui commencera dans la tête de ses enfants. La culture du minima, « l’incantation du pauvre », comme dirait Jimmi Hope le chanteur, et l’appel du ventre devront laisser place à un nouveau contrat national.