30 avril 2012

En attendant la Diaspora togolaise
















Une dizaine d'années passées à l'extérieur du pays, quelques voyages en Europe de l'Ouest, en Amérique du Nord et dans des pays africains ont confirmé et renforcé ma connaissance des Togolais vivant à l'étranger. Je n'ai pas personnellement réalisé une étude sur le sujet avec des références statistiques pour cerner la question ; mais la présence des communautés togolaises, leur organisation, leurs liens avec le pays tout comme leur capacité d'action ont pu faire l'objet de quelques travaux et réflexions dont je partagerai les résultats le moment venu.
L'aspect que j'aimerais aborder dans cet article se rapporte à l'engagement politique de la diaspora togolaise et la fixation que le pouvoir fait sur elle depuis quelques temps. Il faut d'abord comprendre que cette diaspora à l'instar de nombreuses autres n'est pas une composante homogène avec des orientations claires. Sur le plan purement politique, dans les grands pays de regroupement des Togolais comme le Ghana, l'Allemagne, la France, le Gabon, le Bénin, les USA, le Burkina Faso et le Canada, nos compatriotes sont identifiables dans quatre catégories non exhaustives:
  1. Les citoyens engagés dans des mouvements associatifs, politiquement connotés de l'opposition;
  2. Les citoyens organisés dans des structures semi-associatives et afiliées aux Ambassades du Togo dans le pays hôte;
  3. Les citoyens organisés au sein d'organisations communautaires, à caractère purement social;
  4. Des citoyens sans aucune affiliation associative ni engagement politique.
Plusieurs projets d'identification et de structuration des Togolais de l'étranger existent. Les plus récents ont été initiés par le gouvernement, dans l'intention dit-on, d'impliquer ces compatriotes dans le développement du pays. Les autorités togolaises n'ignorent pas le potentiel économique que représente cette communauté, estimée entre 1500 000 et 2 millions d'âmes. Je crois que ce chiffre est en deçà des réalités. Les communautés togolaises dans les trois pays voisins : Ghana, Bénin et Burkina Faso seuls ajoutées à celle de la Côté d’Ivoire devraient faire dans les 2 millions de citoyens! Le recensement de 2010 a estimé la population résidant au Togo à 5 753 324. Ainsi donc la diaspora serait la première région du Togo, avec plus de 25% de la population générale. Selon Samir Abi, commentant une étude menée en Allemagne au dernier semestre de l'année 2011 sur les transferts de fonds des migrants togolais, "la diaspora togolaise se retrouve ainsi majoritairement en Afrique (Gabon, Côte d’ivoire, Burkina, Bénin), en Amérique du Nord (États-Unis et Canada) et enfin en Europe (France, Espagne, Allemagne, Belgique)".
Contrairement à des idées reçues, les transferts des migrants togolais en Afrique vers leur pays est plus important que ceux de leurs compatriotes dans les pays du Nord. Le tableau ci-dessous donne un aperçu de la comparaison des envois d’argent au pays par les migrants togolais.
1.Diaspora togolaise aux États-Unis 47,12 millions US$
2.Gabon 44,67millions US$
3.Espagne 29,96 millions US$
4.France 22,54 millions US$
5.Côte d’ivoire 18,59 millions US$
6.Burkina Faso 12,91 millions US$
7.Congo 8,45 millions US$
8.Allemagne 7,32 millions US$
 Source: Samir Abi (opp cit.)
Ce poids financier interpelle quant à la question de l’engagement politique. Il se pose une problématique pour le moins paradoxale qui induit une conséquence que je trouve par contre intéressante. Le gouvernement RPT/UFC en place à Lomé a créé au Ministère des Affaires étrangères, une Direction chargée des Togolais de l’étranger. Les premières initiatives démontrent que c’est l’argent de cette communauté qui intéresse ces gouvernants. Un projet financé par la Banque Africaine de Développement est en train de procéder à un recensement de ces Togolais. Beaucoup de compatriotes de peur de se faire instrumentaliser ou repérer par les services secrets du Togo s’en méfient et n’y participent pas.


Des organisations de la société civile au Togo ont également des projets de développement local impliquant les Togolais de l'extérieur. L'idée est d'amener des gens à soutenir des projets de micro-réalisation dans les localités d'origine des migrants. Je ne suis pas autorisé à en dire plus, de crainte que certaines personnes ne dénaturent cette initiative... 

De l’autre côté, le même gouvernement RPT/UFC a décidé (bêtement) de durcir la législation sur la double-nationalité. Un projet de loi en discussion prévoit de déchoir de leur nationalité, les Togolais ayant acquis une autre nationalité dans les pays qui astreignent à renoncer à la nationalité d’origine. Le but, vous vous en doutez, c’est de contenir la «menace » que constituent les élites de la diaspora sur le plan politique. Le manège a été monté dans les officines du pouvoir dans le dessein de couper l’herbe sous le pied des partis de l’opposition qui sont les plus grands bénéficiaires de l’apport en ressources humaines en provenance de la diaspora. Les tenants de l’oligarchie comprador vont plus loin, ils maintiennent dans la loi électorale l’obligation de résidence (au moins 6 mois avant le scrutin) pour empêcher les citoyens expatriés à se porter candidats lors des prochaines élections législatives et municipales…
Le RPT/UNIR a peut-être vu juste en s’intéressant à ces Togolais. La diaspora togolaise constitue une formidable force politique qui pourrait se révéler décisive dans la bataille pour le changement dans notre pays ainsi que dans son développement. Mais je vois mal ces Togolais, dans les conditions actuelles, investir dans ce pays. Ceux qui s'y sont essayés ces dernières années l'ont regretté.  L'ouverture de façade ne profite qu'aux membres de l'oligarchie et à leurs proches. Nos concitoyens ne vont pas non plus se contenter de jouer aux assistants sociaux, en continuant d'envoyer leurs ressources (acquises dans des conditions éprouvantes) pour colmater les brèches du fait de la mauvaise gestion des affaires publiques nationales et de la corruption qui se pratique à l'air libre dans ce pays. 
Le prince-héritier Faure et ses comparses savent bien que la très grande majorité de cette diaspora milite pour le changement démocratique. C’est sans équivoque.
Continuons à travailler à la réorganisation de la diaspora, dans l’optique des prochaines échéances (pas nécessairement électorales) pour le changement au Togo. La restructuration des communautés de Togolais à l’étranger doit obligatoirement tenir compte des affinités politiques. L’urgence est de faire de la diaspora le fer de lance pour l’alternance à la tête du Togo d’ici en 2015. Au-delà des organisations et fraternités ça et là, l’enjeu appelle à la mise en place des Conseils démocratiques des Togolais de France, de Belgique, d’Allemagne, du Gabon, du Canada, des USA, du Ghana, etc… Ces conseils démocratiques (ce n’est pas un vœu pieux, cette dynamique à l’étude depuis quelques années est en voie d’implémentation dans quelques pays) seraient des organisations d'obédience démocratique engagées aux côtés du mouvement socio-politique porteur du projet d'alternance et de reconstruction nationale . Il faut s’attendre à plus de cohérence et d’efficacité dans la participation citoyenne des Togolais de l’extérieur. Dans plusieurs pays, en Afrique comme en Europe ou en Amérique du Nord, l'intérêt de nos compatriotes pour ce renouveau est encourageant, pour le moins. 
Et puisque la dictature leur déclare la guerre en s’en prenant à leur citoyenneté, la réponse devra être à la hauteur de l’attaque.
Dany K. Ayida

27 avril 2012

La preuve par l'absurde

La répression barbare de la manifestation pacifique organisée ce jour par le Collectif Sauvons le Togo est inacceptable. Nul n'aurait besoin d'autorisation pour manifester le jour de l'indépendance. Le CST avait demandé à ses militants d'aller se recueillir sur la place de l'indépendance. L'intervention musclée des gendarmes a occasionné plusieurs blessés dont des journalistes qui n'avaient pour tort que faire leur travail.
Le régime de Faure Gnassingbe vient de montrer qu'il ne peut changer. Ceux qui se laisser attendrir par les appâts d'UNIR/RPT doivent méditer ce qui vient de se passer. Il y a urgence à mettre fin à cette aventure.
Ce qui s'est passé à Lomé ce 27 Avril est la preuve claire que le nouveau discours du pouvoir pour la réconciliation nationale et le changement n'est que du vent. Le renouveau méthode  Faure est un manège, un piège à con pour anéantir le besoin de démocratie qu'il sait fort chez les Togolais.
Mon ami Noel Tadegnon, l'un des meilleurs journalistes sur place actuellement au Togo a été grièvement blessé par les gendarmes qui l'ont frappé sauvagement. Noel, selon les nouvelles est hospitalisé dans une clinique dans un état critique. Un  jour, justice sera fait.
Dany Ayida

30 janvier 2012

Il faut sauver le "sodat" Alioune Tine

Pour être un soldat, Alioune l'est plus que tous. Celui que la Brigade des Investigations Criminelles du Sénégal soumet depuis trois jours à un interrogatoire (caustique à en croire un journaliste dakarois) n'est autre que ce démocrate résolu et intègre, qui a toujours su faire siens les combats des Africains pour la liberté et la démocratie. Le président de la RADDHO est un combattant de la première heure, celui là que les "prédateurs de la démocratie" (c'est son expression) n'ont jamais su séduire ni réduire avec tous leurs atours.

Je suis motivé ce matin pour écrire quelques lignes dès que j'ai appris les conditions de son interpellation et de sa détention. Étrangement, cela ressemble trait pour trait à ce qui nous était arrivé le 19 Mars 2003 et qui eût été pire si Alioune n'avait su jouer de sa partition pour nous sortir des griffes de la même brigade des investigations criminelles du Ministère de l'intérieur du Sénégal. Nous organisions à Dakar un colloque regroupant des acteurs de la société civile et de la diaspora togolaise, dans le but de nous inspirer des expériences de transition démocratique réussie en Afrique de l'Ouest pour contribuer au changement auquel nous aspirons au Togo... Eyadema nous ayant accusés de fomenter un coup d'Etat contre son régime, le pouvoir d'Abdoulaye Wade avait voulu empêcher la tenue de notre rencontre à Dakar. J'ai été convoqué par la Brigade en question en vue disait-on de formalités administratives relatives à notre rencontre. De 8 heures du matin, je ne fut autorisé à quitter les lieu qu'un peu avant minuit... C'aurait pu être pire. Alioune Tine, alors Secrétaire Génral de la RADDHO avait fait sienne notre cause. Il avait mobilisé toute la presse nationale et internationale et s'apprêtait à mettre dans la rue des organisations citoyennes et des partis politiques sénégalais, en vue de dénoncer le "soutien de Wade à l'autocrate de Lomé"... Le colloque avait fini par avoir lieu! Grace à la tenacité d'Alioune Tine et des camarades de la RADDHO.

Je me demande ce qu'auraient été les conditions aujourd'hui, si le leader du M23 n'était pas victime d'un système politique du genre de celui que nous dénoncions au Togo. Je suis convaincu d'une seule seule chose: Alioune Tine n'allait pas inviter des citoyens africains à venir maintenant s'inspirer du "modèle" de son Sénégal sous Wade. La dérive du régime du PDS est inquiétante. 

Nous sommes de cœur avec toi Alioune. Nous aimerions tellement faire comme tu sais si bien procéder. A bientôt pour la suite du combat pour la dignité et la liberté.
Que les démocrates du monde entier se lèvent pour manifester leur soutien à ce brave homme.

Dany K. Ayida